Sénégal : énormes pertes financières liées à la fraude et l’évitement fiscal
C’est un défi pour tous les pays : s’assurer que les entreprises versent à l’État ce qu’elles lui doivent sous la forme d’impôts. C’est particulièrement vrai sur le continent africain et pour les industries extractives au Sénégal puisqu’elles pourraient représenter jusqu’à 9% des recettes fiscales du pays en 2030. Mais elles sont nombreuses à déployer des stratégies pour ne pas s’en acquitter. Stratégies mises en lumière par un rapport du Natural Ressource Governance Institute publié le 25 novembre 2024.
Il est question d’évitement fiscal et de fraude fiscale, mais le rapport s’arrête surtout sur le système de fausse facturation commerciale, qui permet aux entreprises de transférer des richesses hors du pays sans être imposées.
Ainsi, chaque année, au Sénégal, 153 millions de dollars, soit 3% des recettes fiscales, n’arriveraient jamais dans les caisses de l’État, selon le rapport. Comme l’explique William Davis, son auteur : « C’est là où on a les preuves les plus concrètes de pertes de recettes, et c’est là où il existe des solutions assez claires. Par exemple : un meilleur partage d’informations entre les services douaniers dans différents pays, pour pouvoir comparer les factures qui sont déclarées pour une même cargaison à l’exportation et l’importation. »
Parmi les autres recommandations : augmenter le nombre de fonctionnaires chargés d’inspecter les entreprises et élargir les audits aux sous-traitants par lesquels se produisent bien souvent ces détournements.
« Ce rapport vient renforcer la conviction du gouvernement »
Des éléments déjà identifiés par les autorités, rappelle Aminata Seck Ndao, directrice de la règlementation au ministère de l’Énergie, du pétrole et des mines : « Le rapport vient juste nous renforcer dans la conviction du gouvernement qu’il nous faut maîtriser ces pratiques-là pour pouvoir tirer le maximum du cadre de l’exploitation, qu’elle soit minière, pétrolière ou gazière. Nous sommes déjà dans cette dynamique. »
L’enjeu devient d’autant plus grand pour l’État que le pays a commencé à produire ses premiers barils d’hydrocarbure et compte renégocier les contrats qui le lient à des entreprises étrangères.
- La fraude fiscale, la fausse facturation commerciale et les efforts déployés par les multinationales pour éviter de payer des impôts représentent des risques de taille dans le secteur extractif, en particulier dans les pays en développement, et parmi eux le Sénégal.
- Les estimations quantitatives de la fausse facturation commerciale suggèrent qu’il s’agit d’un problème non négligeable pour le Sénégal (y compris pour son secteur minier), entraînant des pertes qui se chiffreraient entre 1 % et 3 % des recettes fiscales du pays.
- Il est important que le Sénégal s’attaque à ces risques, en particulier avant de se lancer dans des opérations de production pétrolière et gazière à grande échelle. Faute de quoi les recettes provenant des ressources en hydrocarbures du pays seront menacées.