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Investir en Afrique

Le business des VTC en plein essor malgré un marché africain peu préparé

Au cours des trois dernières années, les habitudes de consommation d’Internet ont changé sur le continent. Les populations ont découvert de nouveaux usages qui rythment aujourd’hui le quotidien de millions de personnes. Entre flexibilité, efficacité et sécurité, divers services voient le jour, mûrissent et dévoilent de nombreuses opportunités économiques. Cependant, pour saisir tous ces avantages, il est indispensable que les gouvernements définissent dès maintenant des règles de jeu adaptées.

En février 2023, la start-up estonienne de mobilité Bolt a annoncé un investissement de 500 millions € pour développer son activité en Afrique au cours des deux prochaines années. Elle désire créer des opportunités pour enregistrer plus de 300 000 nouveaux chauffeurs et coursiers sur son application mobile, seulement en 2023. Au Kenya, son principal marché, l’entreprise a prévu d’injecter 100 millions € pour étendre son service au-delà des 16 villes où elle est déjà présente et dominer des concurrents tels que Farasi Cabs et Yego Global.

En juillet 2022, la capitale Nairobi avait d’ailleurs été retenue par Bolt pour abriter son quartier général régional. L’installation, qui devrait accueillir les cadres supérieurs exécutant des opérations en Afrique, servira également de base opérationnelle d’où sera piloté le développement des activités de l’entreprise dans la sous-région Afrique de l’Est.

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Forte d’environ 900 000 chauffeurs qui transportent près de 47 millions de clients dans sept marchés africains que sont le Kenya, l’Ouganda, la Tanzanie, le Nigeria, le Ghana, l’Afrique du Sud et la Tunisie, Bolt renforce son empreinte en Afrique au regard de la maturité qu’enregistre progressivement le segment de marché de la réservation de taxi et véhicule avec chauffeur en ligne sur le continent. Cela s’est traduit au cours des cinq dernières années par une diversification des marchés ciblés par les acteurs étrangers, une multiplication des acteurs locaux, ainsi que par l’accroissement de l’investissement dans le secteur.

Un marché dynamique

Aujourd’hui, les opérateurs étrangers que sont Yango, Uber, Heetch, Bolt, bataillent dur sur le marché africain aux côtés d’opérateurs locaux de moindre envergure, mais très ambitieux comme l’ivoirien Moja Ride, le tunisien Amigo, le congolais Hoja Taxi, le marocain Pip Pip Yalah ou encore l’éthiopien RIDE. Des solutions propres aux réalités de certains marchés rencontrent également du succès à l’instar des applications pour moto telles que le togolais Gozem, le camerounais Bee, le nigérian MAX.ng ou l’ougandais Safeboda.

Les services de mobilité ont connu une embellie depuis la Covid-19 et ses restrictions des contacts. Aujourd’hui, près d’une trentaine d’acteurs opèrent à travers le continent. La maladie a en effet influencé les habitudes de consommation de la population et développé la demande en services premium en ligne comme la télé sur Internet, l’achat et la livraison à domicile.

Avec un taux de pénétration d’Internet déjà élevé en zones urbaines, un taux de pénétration croissant du smartphone et une classe moyenne de plus en plus en plus forte – elle était de près de 350 millions de personnes en 2010 pour une population d’environ 1,039 milliard d’individus – en quête d’une expérience de transport de meilleure qualité en termes de confort et de sécurité, les taxis en ligne ont trouvé dans le contexte un environnement propice à leur activité.

Un intérêt croissant

Les investisseurs qui étaient jusqu’alors timides ont vite réagi en conséquence et cela s’est traduit par une croissance du financement au cours des trois dernières années. Entre 2019 et 2021, le volume de fonds mobilisés par les start-up africaines de la mobilité est passé de moins de 20 millions $ à 78 millions $ en 2020, selon le fonds de capital-risque Partech. Puis, il est passé de 105 millions $ en 2021 à 195 millions $ en 2022. Ces investissements sont susceptibles de croître davantage au regard de l’intérêt croissant des consommateurs et des investisseurs pour le secteur de la réservation de taxis et VTC en ligne.

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Selon la base de données Statista, le secteur connaîtra encore de la croissance durant les prochaines années. Le chiffre d’affaires du segment « Ride-hailing & Taxi » devrait atteindre 4,13 milliards de dollars en 2023. Le chiffre d’affaires devrait afficher un taux de croissance annuel (TCAC 2023-2027) de 3,83 %, soit un volume de marché projeté de 4,80 milliards de dollars d’ici 2027. Dans le segment des services de navettes et des taxis, le nombre d’utilisateurs devrait s’élever à 62,12 millions d’ici 2027.

Le taux de pénétration des utilisateurs serait de 4,3 % en 2023 et devrait atteindre 4,5 % en 2027. Si de nombreuses opportunités professionnelles et économiques pointent à l’horizon à travers les multiples investissements qu’annoncent les entreprises détentrices d’applications de réservation de taxi, des sons de mécontentement se multiplient tout de même en l’état actuel du marché africain.

Défis et opportunités

En effet, en l’absence d’actions concrètes dans plusieurs marchés du continent, la grogne grandit. Au Cameroun, le gouvernement avait menacé en février 2023 de suspendre les activités de Yango suite aux protestations des chauffeurs de taxi qui dénonçaient une concurrence déloyale de la plateforme russe. L’Etat exige de la société une mise en conformité de ses activités avec le régime fiscal en vigueur. En Côte d’Ivoire en octobre 2021 et au Sénégal en novembre 2022, les chauffeurs de taxi décriaient déjà la même situation. Il manque à ces nouveaux acteurs un cadre réglementaire adapté, à même d’apaiser le sentiment profond d’injustice que ressentent les syndicats de chauffeurs de taxi.

Dans certains pays, l’Etat a plutôt vite réagi. Au Ghana, la nouvelle directive pour les entreprises de réservation de taxi en ligne a été adoptée et est entrée en vigueur le samedi 1er avril 2023. Elle rend, entre autres mesures, obligatoire l’enregistrement de tous les véhicules privés destinés à des fins commerciales contre 30 cedis, l’obtention d’une licence annuelle de transport numérique à 33 cedis qui donne droit à un autocollant à apposer sur le pare-brise avant du véhicule.

Les usagers doivent également payer une taxe de 1 cedi pour chaque déplacement. Au Kenya, la taxe sur les services numériques, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2021, touche l’activité des applications de transport. L’Etat prélève 1,5 % sur le revenu mensuel réalisé par Uber, Bolt et les autres. En Tanzanie, le gouvernement taxe également les services numériques depuis le 1er juillet 2022.

Selon Google et la Société financière internationale, l’économie numérique pourrait contribuer pour 180 milliards $ à l’économie africaine d’ici 2025. Soit 5,2 % du produit intérieur brut (PIB). D’ici 2050, cette contribution pourrait grimper à 712 milliards $. Pour garantir ce gain potentiel, il est urgent que chaque Etat œuvre dès maintenant à l’adoption d’un cadre légal propice aux investissements et à la facilitation des affaires dans le secteur numérique. Les applications de VTC ne sont qu’un des nombreux domaines où l’activité se développe rapidement sur le continent et requiert des règles d’engagements claires.

Source : Agence Ecofin

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