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Economie

Croissance par habitant supérieure à 3%: les retombées sur les ménages africains… en théorie seulement

Selon les prévisions du dernier rapport «Africa Pulse» d’octobre 2024 de la Banque mondiale, près de 40% des pays d’Afrique subsaharienne (19 sur 47) devraient afficher une croissance économique par habitant positive sur la période 2022-2025, dépassant même leurs performances d’avant la pandémie. Parmi ceux-ci, dix pays se distinguent avec des taux de croissance annuels moyens par habitant estimés supérieurs à 3% pour la période allant de 2022 à 2025. Il s’agit notamment du Bénin, du Kenya, de la Mauritanie, de l’Île Maurice, du Rwanda, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, de l’Ouganda, de la Tanzanie et de l’Éthiopie.

Mais qu’est-ce que la «croissance par habitant supérieure à 3%» signifie concrètement ? La croissance par habitant supérieure à 3% signifie une amélioration substantielle du niveau de vie de la population. Prenons l’exemple de la Côte d’Ivoire où ce taux devrait être supérieur à 3,5% par an sur la période 2022-2025 selon les prévisions.

Un taux de croissance du PIB par habitant de 3,5% traduit une augmentation annuelle moyenne de 3,5% du revenu disponible moyen par personne. Cela signifie que si le revenu moyen par Ivoirien était de 1000 dollars en 2021, il atteindrait environ 1035 dollars en 2022, 1071 dollars en 2023, 1109 dollars en 2024 et environ 1148 dollars en 2025.

Ainsi, en l’espace de seulement 4 ans, le revenu moyen par Ivoirien aurait augmenté d’environ 148 dollars, passant de 1000 à 1148 dollars, soit une hausse de 14,8%. Cette progression rapide du pouvoir d’achat se traduirait par une nette amélioration des conditions de vie des ménages ivoiriens.

Ils pourraient accéder plus facilement à une meilleure alimentation, un logement décent, des soins de santé, l’éducation pour leurs enfants. La demande intérieure en biens de consommation et services augmenterait, stimulant l’activité économique locale. Une classe moyenne émergente disposerait de revenus supplémentaires à consacrer aux loisirs, au tourisme ou à l’épargne.

Bien que théorique, cet exemple chiffré illustre l’impact très concret d’une croissance économique vigoureuse sur le niveau de vie d’une population. C’est la raison pour laquelle les gouvernements ciblent en priorité une croissance forte et inclusive, permettant une réelle hausse des revenus par habitant.

Selon les experts de la Banque, «les réformes structurelles et les investissements publics dans les infrastructures comptent parmi les principaux moteurs de cette amélioration des performances». Quelles sont donc ces réformes clés entreprises par ces pays résilients ?

Des réformes clés

Au Rwanda par exemple, «des réformes favorisant un environnement propice aux affaires, des investissements dans l’énergie et les transports, ainsi qu’une intégration régionale accrue ont stimulé une croissance robuste ces dernières années» selon la Banque mondiale. Le pays a notamment accéléré la facilitation du commerce et la numérisation des services publics.

Au Kenya, «l’amélioration des conditions macroéconomiques avec une baisse de l’inflation et une plus grande stabilité du shilling soutient la consommation et l’investissement privés». Les pressions sur les liquidités ont cependant exposé le pays à une volatilité mais les reprises dans l’agriculture et le tourisme portent la croissance.

En Mauritanie, «les réformes structurelles, la diversification économique et les investissements dans les infrastructures routières et portuaires» sont cités comme moteurs d’une croissance supérieure à 4% par an selon la Banque.

La Côte d’Ivoire a ainsi renforcé la gouvernance des entreprises publiques, modernisé son administration fiscale et lancé un vaste programme d’investissements dans les infrastructures numériques et de transport. « Ces réformes ont porté leurs fruits avec une croissance projetée à 6,5% en 2024″, indique le rapport d’Africa Pulse.

«L’Éthiopie a massivement investi dans l’agriculture, l’électrification rurale et la construction d’infrastructures industrielles ces dernières années, ce qui stimule sa productivité», explique le rapport.

Quant à l’Ile Maurice, son modèle économique diversifié, sa stabilité politique et ses réformes perpétuelles du climat des affaires en font un champion de la croissance inclusive dans la région.

Au Sénégal, les efforts pour améliorer le climat des affaires et renforcer les infrastructures ont porté leurs fruits. Les investissements massifs dans les infrastructures routières, ferroviaires et aéroportuaires, ainsi que le déploiement des technologies numériques, ont permis de désenclaver certaines régions et de faciliter les échanges commerciaux.

La mise en place de politiques macroéconomiques prudentes, avec un contrôle strict de l’inflation et de la dette publique, a contribué à restaurer la confiance des investisseurs nationaux et étrangers. Le Sénégal a ainsi pu diversifier son économie au-delà des secteurs traditionnels comme l’agriculture et la pêche, en favorisant l’émergence de nouveaux pôles de croissance dans les services, l’agroalimentaire et les industries légères.

Le Bénin, quant à lui, a connu une croissance économique soutenue ces dernières années, grâce à des réformes structurelles ambitieuses. Le gouvernement a mis l’accent sur l’amélioration du climat des affaires, la facilitation du commerce, la modernisation des infrastructures portuaires et la promotion des investissements privés.

Le secteur agricole, qui emploie une grande partie de la population active, a bénéficié d’investissements importants pour accroître la productivité et développer les cultures d’exportation comme le coton. Parallèlement, le Bénin a diversifié son économie en attirant des investissements étrangers dans les secteurs des télécommunications, de la logistique et du tourisme, profitant de sa stabilité politique et de sa position stratégique dans la région.

Des risques liés aux chocs climatiques

Malgré le choc sans précédent de la pandémie de Covid-19, comment ces pays ont-ils réussi à maintenir des taux de croissance aussi élevés? Outre les réformes structurelles déjà engagées, la consolidation des réformes macroéconomiques et l’approfondissement des investissements publics productifs sont cités comme des facteurs clés.

Cependant, ces pays ne sont pas à l’abri des défis pour pérenniser cette croissance forte et inclusive. Le rapport souligne les défis liés aux infrastructures déficientes, au manque d’accès à l’éducation et aux services de santé de qualité, ainsi que la nécessité de diversifier leurs économies au-delà des exportations de matières premières.

La Banque mondiale insiste également sur les risques extérieurs comme les chocs climatiques, l’instabilité géopolitique régionale et les conflits armés, qui pourraient saper les efforts de développement économique et social dans ces pays.

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